Pour quelles raisons les réductions d’impôt en immobilier sont-elles de plus en plus conditionnées ?
L’écologie et les réductions d’impôt de son plus en plus liées. Ainsi e dispositif Pinel qui accompagne – voir soutient – le secteur de la construction résidentielle dans le neuf, va évoluer au cours de ces prochains semestres. Dans un premier temps les réductions d’impôt vont rester identiques pour tous les actes immobiliers passés avant le 31/12/2021, puis les taux se dégraderont progressivement.
Diminution progressive de la réduction d’impôt PINEL en 2023 et 2024
Pour rappel, la réduction d’impôt en loi Pinel dépend de plusieurs paramètres :
- La zone géographique de l’immeuble (zone A, A bis et B1) – retrouvez les villes éligibles ici
- La durée de location : 6 ans, 9 ans et 12 ans; réduction d’impôt de 12%, 18% et 21%.
- La location de l’appartement avec des plafonds de ressources de locataires et un plafond de loyer selon le zonage. Retrouvez les conditions ici
A partir de 2023, le taux de réduction diminuera pour être de 10,5% | 15% | 17,5%. Et dès 2024, les taux se stabiliseront à 9% | 12% |14% (1).
Le même amendement fait part de plusieurs réserves sur ce dispositif d’investissement, notamment le coût par logement pour l’Etat (près de 38 000€) ou la nécessité d’une meilleure performance énergétique des bâtiments. Ce dernier point traduit une politique fiscale et immobilière qui s’est mise en place il y a déjà plusieurs années :
- La loi Pinel est conditionnée à la norme RT 2012 pour les bâtiments
- Le dispositif Denormandie génère une réduction d’impôt identique à la loi Pinel sous réserve d’un bouquet de travaux énergétiques représentant au moins 25% du prix de revient,
- La loi Pinel dans l’ancien permet de bénéficier d’une réduction d’impôt sous réserve de l’obtention l’obtention du label HPE.
En illustration de cette volonté d’associer l’écologie à la création de logements, l’amendement précise les types de biens qui bénéficieront d’un taux de réduction plus attractif :
- Les immeubles neufs répondant à la nouvelle norme RE 2020. Initialement prévue pour 2020, le contexte de crise sanitaire à reporter sa mise en œuvre pour mi 2021.
- Les bâtiments anciens remis comme à neuf, pour lesquels des travaux de rénovation lourd auront été réalisés,
- Les logements rénovés dans les quartiers prioritaires
Une transformation des dispositifs
Pourquoi cette course à l’efficience énergétique des bâtiments ?
Il est aujourd’hui communément acquis que nos émissions de dioxyde de carbone et de méthane entraînent un développement de gaz à effet de serre (GES) dans l’atmosphère ayant un impact direct sur les bouleversements climatiques et sanitaires que nous vivons (2). La maîtrise de la chaîne économique visant à améliorer notre consommation d’énergie et à diminuer les émissions de GES est donc devenue un enjeu majeur.
Le bâtiment est l’un des secteurs les plus consommateur d’énergie tout en étant également l’un des plus émetteur de GES (3) :
- Le secteur du bâtiment représente plus de 40% de la consommation d’énergie finale (4)
- Avec 76 millions de tonnes de CO2, pour l’essentiel produites par ses usages énergétiques, le secteur du bâtiment est ainsi responsable de 21% de ces émissions. (5)
Quelles mesures ont été prises pour y remédier ?
Les mesures sont nombreuses, mais nous retiendrons 3 événements majeurs qui ont rythmés ces dernières décennies en matière de prise de conscience et d’actions. Le Grenelle de l’environnement qui sera plus tard amendé par l’Accord de Paris. Il marquera des ambitions plus fortes et partagée par la communauté internationale ; et enfin la traduction de cet accord au niveau européen par la loi climat.
Grenelle de l’Environnement en 2008
Deux grands objectifs pour l’immobilier ont été déterminés :
- la rénovation des immeubles existant en distinguant bâtiments publics, logements sociaux et le parc résidentiel privé,
- une meilleure efficacité énergétique pour les immeubles neufs : label BBC pour une consommation inférieure à 50kwh/m²/an
L’Accord Paris Cop21 en 2015
Un objectif visant à diviser par quatre de nos émissions de CO2 en 2050 par rapport à 1990 « Facteur 4 ».
La loi européenne sur le climat
Elle se substitue au « Facteur 4 » de la Cop 21 par l’approche de la « Neutralité Carbone ». C’est un équilibre entre l’émission de carbone et son absorption (par des puits de carbone tels que les sols, forêts, océans) : la différence doit être nulle. En 2019, les émissions mondiales s’élevaient à 38 Giga tonnes de CO² contre 11 Giga tonnes absorbées par les puits de carbone (6). Cette nouvelle directive européenne incite la France à diviser non pas par 4 ses émissions de GES mais au moins par 6.
En immobilier, ces engagements se traduisent par des incitations réglementaires à la fois sur les immeubles mais également au niveau des promoteurs :
- RT 2012 : le label énergétique devient une condition de vente sous dispositif PINEL pour les promoteurs : c’est-à-dire que la réduction d’impôt est octroyée aux immeubles répondant à la norme énergétique (consommation inférieure à 50KwH / m²/an pour le neuf)
- RE 2020 : le label qui se substituera à la RT2012 dès 2021. Les bâtiments auront une faible empreinte carbone tout au long de leur cycle de vie (de la conception jusqu’à la démolition). Une démarche s’appuyant sur le label Énergie Positive et Réduction Carbone (E+C-) qui vise à promouvoir les bâtiments produisant en moyenne plus que leur consommation (BEPOS). Cette démarche, jusqu’à aujourd’hui volontaire, s’imposera à tous les bâtiments dès l’année prochaine.
- La politique RSE (Responsabilité Sociétale des Entreprises) obligatoire pour les sociétés cotées ou les entreprises réalisant de manière cumulative plus de 100 millions de CA et ayant plus de 500 salariés permanents. Des critères qui s’appliquent également aux grands promoteurs nationaux. La démarche RSE vise à intégrer des critères extra financiers dans le pilotage de l’entreprise. Trois catégories sont communément retenues : la gouvernance, l’environnement et le social. Des objectifs ainsi que leurs indicateurs sont déterminés et suivis tout au long de l’année. Les entreprises rendent compte de leurs évolutions sur ces thématiques à travers de leur rapport d’activité annuel.
Des initiatives pour réduire l’empreinte carbone dans le secteur immobilier
La réduction des énergies consommées dans le bâtiment et des émissions de GES pour atteindre la neutralité carbone en 2050, passent nécessairement pour des mesures réglementaires. Mais elle s’accompagne aussi d’initiatives volontaires de la part des acteurs de l’immobilier. Citons par exemples
- Les PME qui s’inscrivent dans la dimension RSE avec le label ISO 26000 alors qu’elles n’y sont pas contraintes aujourd’hui. C’est une manière pour elles d’indiquer leur implication dans la lutte contre le réchauffement climatique et la prise en compte des changements sociétaux que nous vivons.
- Les entreprises qui s’inscrivent dans une démarche Chantier Zéro Carbone. Une ambition qui oblige à repenser le sourcing des matières premières, la gestion du chantier, le réemploi des matériaux, la gestion des déchets … (7)
- Les promoteurs qui travaillent avec du bois massif générant un gain carbone conséquent. Pour un logement en bois massif de 60m², le gain carbone est de 30 tonnes, ce qui représenterait 44 ans de chauffage au gaz de ce logement, 250 ans de chauffage électrique ou encore 9 ans de distances parcourues par un automobiliste (soit 120 000 km) (8). Un constat qui n’est pas étonnant puisque le bois est un formidable piège à carbone et qu’il continue à le stocker après sa découpe.
- D’autres approches sont à souligner telle que donner une nouvelle vie à un bâtiment comme la transformation d’une caserne ou d’un immeuble de bureaux en logements. L’ADEME soulignait en décembre 2019 que la construction d’un bâtiment de logements collectifs ou d’un EHPAD consomme en moyenne 1,6 t/m2, soit environ 80 fois de matériaux par m² de surface de logement que la rénovation. (9)
Alors, un dernier point : acheter plus « vert » coûte-t-il plus cher ?
L’innovation associée à une démarche responsable peut être facteur d’un surcoût. Mais bonne nouvelle, Qualitel a communiqué sur une récente enquête (10) : les bâtiments portant un label type BBC ou HQE, se revendent en moyenne plus cher que leurs cousins non certifiés. En fonction de la ville et du type de bâtiment, cela peut représenter un écart jusqu’à 19%.
Sources et informations complémentaires
- (1)Amendement n°II-3646
- (2) Note de synthèse du Senat – Rapport n° 511 (2018-2019)
- (3) SOeS, bilan de l’énergie 2010
- (4) Ademe – Prospectives 2030- 2050
- (5) Développement durable – site gouv.fr – les défis environnementaux – les émissions de GES du secteur résidentiel
- (6)Parlement Européen : Qu’est ce que la neutralité carbone et comment l’atteindre d’ici 2050
- (7) Carbone 4 – Un label chantier zéro carbone – une première dans le secteur du bâtiment
- (8) Woodeum – en savoir plus
- (9) Ademe – Etude : la construction neuve plus consommatrice de matériaux que la rénovation
- (10)Qualitel – dossier : les bénéfices de la certification